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Gabrielle : « L’affaire Peunade »- Vous dansez merveilleusement bien, mademoiselle Ménard - Monsieur le Baron de Tréville est trop bon, comme toujours. Et c’est vous-même qui m’avez payés mes cours. Je n’ai donc aucun mérite. Et quand je vois votre sœur, je me rend compte que j’ai encore beaucoup de progrès à faire. N’est ce pas elle d’ailleurs avec son mari, dans le coin gauche ? Gabrielle effectue un rapide tour sur elle-même avant de reprendre la main de son cavalier, accompagnant parfaitement la musique. - Oui, en effet, c’est bien Robert de Peunade et ma douce Isabelle. Je la plaint, son beau-père ne va pas bien, et c’est elle qui doit soutenir ce Robert dans cette épreuve - Vous ne l’aimez guère… - Qu’allez vous cherchez là voyons ? Robert de Peunade est mon bien-aimé beau-frère, et je ne permettrai à personne d’en dire du mal. Le couple passe sous les arceaux formés par les autres danseurs traversant la grande salle d’un mouvement gracieux. - Néanmoins, autant tout faire pour que le vieux Comte de Peunade se remette… Ne m’aviez vous pas dit que votre famille possédait un adorable pavillon à la sortie de Charouse où officie l’un des plus éminent médecins de la cour ? - C’est exact, ce bon Docteur Grégoire est effectivement plus que doué. Peut-être pourrais-je suggérer à notre chère Thérèse de le laisser ainsi que le pavillon à disposition de notre ami le vieux Comte. Ils continuent à virevolter quelques instant, avant que la musique ne s’arrête. Gabrielle s’incline très bas, laissant deviner ses formes généreuses, puis rejoint la foule présente dans la grande salle de bal du Palais du Soleil. Son cavalier, le Baron Christian de Tréville, membre sans relief de la glorieuse famille la suit quelques instants des yeux. La soirée s’écoule tranquillement. Passant d’une connaissance à l’autre, Gabrielle observe le couple Peunade. Isabelle se retire assez tôt, mais Robert semble vouloir rester jusqu’au petites heures. Surprenant Christian de Tréville en discussion avec la redoutée Grande Vieille Dame (surnom de Thérèse de Tréville), Gabrielle se concentre sur la matriarche. Lisant sur ses lèvres, elle arrive à comprendre que sa « proposition » est acceptée. Robert continue à discuter, boire et danser, avant d’ordonner à ses gens de le reconduire peu avant le lever du soleil. Suivant le jeune Comte de Peunade de près, Gabrielle ne peut que constater l’état d’ébriété avancé dans lequel il se trouve, avant que son valet ne parvienne à le faire monter dans un fiacre qui démarre rapidement sur les pavés de Charouse. Les jours passent… Après une courte nuit, Gabrielle s’en va rejoindre Gérard Valmert. Elle a rencontré le jeune étudiant en médecine, assistant du Docteur Grégoire, lors d’une soirée chez Christian de Tréville, et il lui a proposer de la raccompagner. Les deux jeunes gens, sans que les Trévilles ne soient au courant, sont devenus amants. Leurs retrouvailles sont passionnées. Enfin, plusieurs heures après, Gérard se rhabille hâtivement - Que se passe-t-il ? - Je doit rejoindre le Docteur, il faut que je surveille un de ses malades, un certain de Peunade, fort mal au point d’ailleurs… - Je en veux pas que tu parte… Quand sera tu de retour ? Ce soir ? - J’ai bien peur que non… Je serais probablement coincé au Pavillon pour une semaine au moins… Je repasserai après-demain. - Tu n’est pas sérieux ? Comment pourrais-je me passer de toi aussi longtemps ? Gérard fini de s’habiller, enfile ses bottes, et sort de la petite maison. Mais son esprit reste auprès de Gabrielle. A chaque moment, il ne pense qu’a elle… Et ce fichu vieillard qui ne veut pas se décider à mourir… Sitôt son amant sorti, Gabrielle enfile une robe et réfléchi… Après demain, mercredi. Convaincre Gérard ne devrait pas être difficile, elle s’en est assurée à plus d’une reprise. Vendredi, Robert et son épouse sont invitée aux dix ans de mariages des De Gornons. L’occasion sera idéale, si Isabelle de Peunade se retire tôt, comme à son habitude. Cela lui laisse amplement le temps… Parcourant la cité, Gabrielle se rend chez Anita, une des « entraîneuses » les plus chiques et les plus réputées de la ville. La matrone l’accueille avec un grand sourire. - Alors, enfin décidée à te trouver un travaille honnête ? - J’ai bien peur que non, Anita, mais il me faudrait une de tes filles pour vendredi… Un cadeau, disons. - Je supposais bien que ce n’était pas pour toi ! Qui veut-tu ? - Je te fait confiance. Assure toi juste qu’elle soit prête vendredi, dès la tombée de la nuit, je viendrai la chercher. - Comme tu voudras. Glissant dans un sourire convenu une petite bourse à la matrone, Gabrielle repart. Son prochain arrêt se fait chez un apothicaire d’un quartier pauvre de Charouse. Ses prix sont élevés, mais les résultats sont à la hauteur. Après d’âpres négociations, et soulagée d’une somme d’argent considérable, Gabrielle repart avec le précieux produit. Bien sur, elle fait confiance aux filles d’Anita, mais deux précautions valent mieux qu’une, et un petit euphorisant ne fera pas de mal. Quand Gérard revient le lendemain soir, Gabrielle l’accueille encore plus chaleureusement que d’habitude. - Ce vieux Peunade va me rendre fou… Je dois repartir à son chevet dès demain matin, et je ne pourrais pas revenir avant deux semaines… Sauf si… - Si quoi ? Mais Gabrielle a bien compris. D’un regard, elle soutient son amant… - C’est un vieil homme, ça ne changera pas grand chose pour lui, une semaine de plus ou de moins… Tandis que pour nous… - Tu as raison, comme toujours. Vendredi soir, je suis seul avec lui. Dans son état, un rien peu l’achever… Gabrielle lui sourit, et lui glisse d’un baiser… - Alors à samedi… Arrive enfin le vendredi. Quelque peu anxieuse, Gabrielle se rend chez les De Gornons. Comme prévu, Isabelle laisse son mari tôt dans la soirée. Profitant d’un instant d’inattention, Gabrielle glisse la potion de l’apothicaire dans la boisson de Robert de Peunade. Elle rejoint ensuite hâtivement Virginie, la fille envoyée par Anita. Elle lui donne rapidement quelques explications, tandis que les deux jeunes femmes rejoignent le manoir des De Gornons. Le fiacre de Robert est bien reconnaissable, gardé par un valet. Faisant signe à Virginie de monter dans le fiacre, Gabrielle s’approche du valet en lui tendant quelques piécettes: - Les nuits sont froides… Pourquoi n’iriez vous pas vous cherchez un verre ? Le Comte à des affaires… Personnelles à régler. Elle indique d’un sourire Virginie, qui a pris place dans le fiacre. Le valet sourit à son tour, empoche l’argent et laisse les jeunes femmes seules. Peu après, Gabrielle observe avec satisfaction Robert sortir d’un démarche hésitante, et monter dans le fiacre. Son valet revient ensuite, et prend les rênes d’un air entendu. Ne reste plus qu’a espérer que Gérard ait fait son travail pense-t-elle. Durant la nuit, c’est un cortège mené par Thérèse de Tréville elle même qui vient annoncer à sa fille et a son mari la douloureuse nouvelle : le vieux Comte de Peunade est mort dans la soirée de sa belle mort. Devant l’entrée, les gardes hésitent : le Comte a demandé qu’on ne le dérange pas… Mais la Grande Vieille Dame n’est pas n’importe qui. Le cortège entre dans le manoir, tandis que Thérèse et Jean-Marie montent vers la chambre des époux. Frappant abondamment, Thérèse rentre, pour découvrir son gendre dans les bras d’une autre fille. Avant que Robert ne puisse comprendre ce qui arrive, Thérèse explose littéralement : - Comment OSEZ-VOUS faire cela à MA FILLE ! Alors qu’elle dors dans cette même maison ! Faites sortir cette traînée d’ici ! Je tiens trop à la réputation de ma famille pour faire éclater l’affaire, même si l’envie ne m’en manque pas, mais je vous promet que VOUS ME PAYEREZ CA ! Profitant de la crise, Virginie s’est de toute façon éclipsée. Gabrielle observe la scène d’un jardin voisin, la voix de Thérèse étant clairement audible, puis s’éclipse dans un sourire. Quelques puissent êtres les projets de son employeur, les de Trévilles et les de Peunades ne sont pas prés de se réconcilier… |