Les Filles du Prince
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            Marina sourit, et se rappelle de comptine enfantines parlant de jeunes filles se perdant les unes après les autres dans les bois, qu’on leur racontait pour leur faire peur. Elle chantonne doucement, et tire sur le Filament Noir le plus tendu, le plus long.

            « Quatre jeunes filles partirent dans les bois.

« La première vit des fruits pendants

  Aux branches d’un arbre et en cueillit

Son trésor au bras, chemin faisant,

Elle se trompa de route et se perdit »

Andréa Lucani fait une grande balade à cheval dans les terres continentales de son père. Loin des regards et des intrigues, elle pousse son destrier toujours plus vite, riant dans le vent, malgré les remontrances de sa dame de compagnie, qu’elle ne tarde pas à lâcher. Dans la forêt lui paraît entre deux arbres un charmant jeune homme, partant dans une folle cavalcade. Andréa se prend au jeu, et éperonne sa propre monture tant et plus. Ce n’est qu’au dernier moment qu’elle voit l’ombre d’une branche d’arbre devant elle.

-         Prince Alberto ?

Alberto Lucani secoue la tête, une fois de plus pris à rêver dans son grand palais. Devant lui se tient son chambellan, l’air sombre.

- Prince, votre aînée, la belle Andréa a fait une chute de cheval sur vos terres…

Elle a rejoint Théus.

- Laissez moi...

Rabenstein fait avancer vers le palais la dizaine d’homme qu’il a entraîné pour le compte d’Allini, par des rues sombres et de plus en plus vides. Certains murmurent que le noble marchand serait lui-même présent, attendant son heure. Rabenstein attend l’arrivée de Timéo De La Rosa, qui devrait bientôt débarquer. Tout semble en place, mais Allini lui-même reste invisible.

Marina rit au éclats quand le filament noir se tend, puis claque d’un coup sec. Et tire vivement sur le second fil.

« La seconde vit une mare

Et se pencha pour s’y mirer

Mais surprise par la nuit noire

Elle se trouva s’y noyer »

Maria Lucani revient vers Gorivari, à bords du propre vaisseau des Lucanis, le Saint Drego, nommé en l’honneur du créateur de la Maison Lucani. La mer est agitée, ce soir, mais pas au point de renoncer au voyage. Déjà, au loin, les lumières des Faliscis sont visibles. Soudain, un horrible craquement se fait entendre, tandis que le vaisseau part dangereusement à la gîte.  Le capitaine fait hâtivement embarquer tout le monde dans les chaloupes, qui s’éparpillent dans la tempête naissante. Celle dans laquelle embarque Maria sombre peu après dans les eaux traîtres de la Mer.

-         Prince…

-         Qui a t il encore ?

-         C’est votre fille, Maria…

-         Théus, qu’ai-je fait pour mériter cela ?

Le filament ne claque pas, il s’effiloche et tombe tout doucement dans les mains de la Sorcière, qui regarde déjà vers le suivant, tandis qu’elle murmure toujours en marchant l’antique comptine.

« La troisième se mit en tête

De gravir jusqu’aux cieux

Le plus haut arbre de la forêt

Dont elle tomba d’un vol gracieux »

            Sofia Lucani est dans une des nombreuses villa de la famille, et s’y ennuie. Ce soir, contrevenant à tout les ordres de sa gouvernante, elle sort dans la ville endormie, qui semble à peine respirer. Arpentant les ruelles cent fois parcourues, Sofia se sent plus seule que jamais. Ses sœurs sont loin, et son père le Prince lui refuse toute visite dans son palais. Perdue dans ses pensées, la jeune fille ne fait guère attention à ses pas. Et il lui semble entendre un étrange rire dans la nuit de Gorivari. Un rire dérangeant, effrayant, mais clairement féminin. Sofia grelotte, tremble de tout ses membres. Quand le rire retentis à nouveau, elle se retourne et s’encours. Mais dans l’un des nombreux escaliers de la ville, ses jambes se dérobent sous elle, l’entrainant vers les eaux sombre du canal en contrebas.

-         Prince…

-         Partez ! Je ne veux rien savoir

-         C’est Sophia, mon Prince

-         Sortez tous ! SORTEZ !

Timéo De La Rosa a débarqué à Gorivari, pour y trouver un étrange messager, muni d’une convocation du Prince lui-même. Plus qu’intrigué par la chose, le jeune Chevalier gravit à pas rapide les escaliers menant au palais.

            Les hommes d’Alinni se sont dispersé dans la ville à différents postes, et Rabenstein en guide plusieurs vers le port pour une mission toute particulière. Incognito, le marchand ambitieux est lui même présent non loin du palais, accompagné de sa garde du corps. Ronaldo Garibaldi, l’homme de Villanova, a pour l’instant déjoué tout ceux qui voulaient le retrouver. N’ayant rien de mieux à faire, il attend.

Marina a entendu un léger bruit d’eau quand le troisième filament s’est brisé. Ses pas à elle l’ont menée jusqu’aux porte du palais, étrangement désertes. S’arrêtant un instant avant l’entrée, elle tire doucement, puis de plus en plus fort, sur le quatrième filament, plus fort, plus proche que les autres, et qui semble résister un instant. Mais il cède peu après dans un claquement sonore.

            « La dernière apeurée

            Sale et noire à souhait

            S’encoura vers un archer

            Qui de peur lui tira un trait

Anna est dans une des chambre du palais de Gorivari, et la nuit semble ici de plus en plus froides. Se levant pour quérir quelqu’un pour faire du feu, elle trouve les couloirs désespéramment vides. Intriguée, puis apeurée, elle parcours le palais, appelant amis ou domestiques. Mais les innombrables chambres sont toutes inoccupées. De plus en plus terrorisée, elle court dans les long corridors, toujours plus longs, toujours plus noirs. Quand elle voit enfin une lumière, elle se précipite en hurlant, pour tomber droit sur une épée tendue comme par réflexe.

Marina rit, et entre dans le palais, bientôt suivie de De La Rosa. Alinni et sa garde entre enfin, tout est prêt pour l’acte final.