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Gorivari est en ce début d’hiver fort calme aux yeux de tous. Mais pas
pour ceux de « Mad Marina ». Ecoutant les conversations de deux des
marins du navire qui la ramène incognito chez elle, elle éclate soudain d’un
rire nerveux, effrayant. Surpris, les hommes s’écartent rapidement, se
demandant ce qui, dans leurs prévisions de passer quelques semaines tranquille
dans l’île de Lucani, à bien pu susciter pareille hilarité.
Marina voit ce que ses sœurs, pourtant puissantes, refusent de voir. Au
travers du regard d’un sorcière, Gorivari est tout autre : les Filaments
se font de plus en plus nombreux, de plus en plus fragiles, aussi. A chaque
instant ils cassent, s’envolent, et se raccrochent aux gré des intrigues,
tandis que se multiplient les Filaments Noirs. Marina éclate à nouveau de rire :
six de ces derniers sont accroché à elle, et elle devine déjà où le premier
la mène. Binio sera à nouveau le premier, comme il fut le premier à la
trahir…
Carmélio Alinni est inquiet. S’il ne peut voir à quelle vitesse vogue
le Destin, sa longue expérience des intrigues Vodacci lui a toutefois fait
comprendre que les choses allait changer. Il y a peu, il a apprit l’existence
de Marina, et il est bien trop prudent que pour ignorer pareille information.
Alors il se prépare. Dans les terres continentales de Lucani, où il possède
un modeste domaine, il a fait venir les mercenaires les plus efficaces qu’il
ai pu trouver. Les coups de forces en Vodacce nécessitent autant de subtilité
que de force, et il ne faire venir une armée sur Gorivari. Mais quelques
dizaines d’hommes bien entraînés pourraient tout changer. Alors il n’a pas
lésiné sur les moyens. D’Eisen, il a fait venir Conrad Rabenstein, un
tacticien de l’école de Steil, qui les entraîne jour et nuit. Dans l’île,
il écoute et regarde, cherchant les signes de l’inévitable hallali, sapant
lentement l’autorité du Prince. Ses alliés et hommes liges, inquiets,
quittent l’entourage d’Alberto Lucani un par un. Il a également écrit à
Timéo De La Rosa, qu’il suspecte fort d’appartenir aux Rose-Croix. Les deux
hommes ne s’entendent guère, mais De La Rosa pourrait être sa seule arme
contre Marina. Reste à le faire intervenir au bon moment, et à surtout ne pas
lui laisser le choix.
Ronaldo Garibaldi est une des Mains de Giovanni Villanova. Il connaît la
prophétie, et doit prévenir son
seigneur dès qu’elle sera accomplie, et s’il le faut qui sait, donner un
petit coup de main au Destin. Le Prince, tenu par les anciens accords, est bien
obligé de le tolérer à sa cour, où Ronaldo attend le moment d’agir.
Binio se prépare à rentrer sur le continent, quand Marina resurgit dans
sa vie. Elle n’a plus rien de la jeune fille qu’il a aimé, et qui revient
parfois hanté ses nuit. La détermination a chassé toute passion de ses yeux,
et son rire jadis si chaleureux fait désormais frémir le jeune moine. Mais
plus que tout, il sait qu’il ne peut lutter contre une volonté bien plus
forte que la sienne, plus forte que tout, peut-être. Alors quand elle le
questionne il répond. Il lui parle du Prince Lucani et de ses quatre filles.
Marina part d’un rire sardonique, et part préparer sa vengeance sans
remarquer qu’aucun des Filaments Noirs ne menait à Binio… Le Prince Alberto Lucani sent l’orage approcher. Mais que d’autres cherchent à s’approprier son pouvoir est le cadet de ses soucis. Un par un, les Filaments se détachent de lui, jusqu'à n’en laisser que quatre, ornés du Cavalier, plus solides et durables que jamais, et un dernier, ténu, faible, et noir comme la nuit. Alberto se consacre à ses filles. |